L’authentique savon de Marseille est fabriqué en chaudron dans le respect des traditions, selon un procédé de saponification spécifique appelé « procédé Marseillais », comportant 7 étapes successives et manuelles :
L’empâtage : la réaction chimique de saponification
Dans les cuves de la savonnerie du Sérail, le maître savonnier élabore deux types de savons : le blanc et le vert. Le 1er est composé d'huile de coprah (noix de coco). La même huile entre dans la composition du 2d, mais en quantités réduites pour laisser la place à 50% d'huile d'olive. Entre les deux cuves ou chaudrons de savon (un pour le blanc et un pour le vert), le maître savonnier surveille la cuisson. La 1ère étape est le mélange des huiles végétales avec l'alcali auquel on va ajouter du sel de mer. On commence par faire bouillir le mélange grâce à la vapeur d'eau qui circule au fond de la cuve dans un serpentin. Par réaction chimique, l'alcali le transforme en pâte et le sel l'épure. Cette opération dure environ 8 heures.
La cuisson dans les chaudrons caractérise la saponification et permet la complète transformation des huiles végétales en savon.
La cuisson consiste à faire porter à ébullition la pâte pendant quatre heures à une température d'environ 100° tout en soutirant régulièrement l'alcali usagé. Commence alors toute une série de lavages. On asperge le dessus du chaudron avec de l'eau froide. L'eau étant plus lourde que la pâte, elle descend au milieu en entraînant dans sa chute les impuretés. Durant cette période, l'attention du savonnier doit être permanente : la pâte bout et, comme du lait dans une casserole, elle peut monter soudainement. C'est à ce moment qu'il doit, avec une longue rame, brasser la pâte pour baisser son niveau. Au bout de trois ou quatre jours, pour vérifier si sa pâte est finie, le savonnier dépose une goutte de savon sur le bout de sa langue : Il la teste ! Si elle est douce, on peut passer à l'étape suivante, si ce n'est pas le cas, il faut continuer à laver la pâte. La cuisson terminée, le savonnier coupe le chauffage et couvre la cuve avec des planches de bois afin de conserver sa température : la pâte doit alors reposer 36 heures.
Le lavage et la liquidation
La pâte de savon est affinée par des lavages, entraînant le glycérol, les impuretés et les acides gras non saponifiés. Puis un dernier lavage à l’eau claire amène le savon à l’état final : un savon lisse et pur qui fait la réputation du procédé Marseillais.
Le coulage : le savon est coulé à chaud (70°) dans des bassins appelés « mises », où il va refroidir et se solidifier pendant à peu près trois jours.
Pendant que la pâte se repose, les savonniers s'activent à l'étage en dessous. Ils préparent les mises qui accueilleront le savon. Minutieusement, les rigoles sont installées, elles relient le fond du chaudron à la mise. Un savonnier libère la pâte liquide. D'abord avec douceur pour vérifier si l'emplacement des rigoles est parfait. Il en profite pour coller avec une truelle le papier recouvrant les séparations en bois au sol avec du savon liquide. Cette opération permet d'étanchéifier la mise. Un ordre du savonnier permet de libérer la cuillère du chaudron et de voir couler le savon rapidement à l'intérieur de la mise. La coulée ressemble étrangement à de la lave en fusion. A la sortie des rigoles, la pâte est filtrée pour retenir les dernières impuretés.
Quand la mise est pleine, on referme la cuillère avec l'arable et le savonnier égalise la surface du savon encore liquide Le savon va alors sécher 48h entre les séparations des mises pendant lesquels il durcit doucement.
Le découpage : la dalle à savon est ensuite découpée en blocs de 40 à 50 kg avant d’être redécoupés en unités de 1000gr, 600gr, 400g et 300gr. Tout est fait manuellement sur des machines d’époque.
A la surface de la mise, les blocs sont tracés au compas, à deux, puis découpés.
Les savonniers travaillent toujours à deux, ils soulèvent des blocs qui pèsent alors 40kgs. Les blocs sont empilés sur un chariot puis déposés sur la table de la découpeuse. Ils sont alors poussés mécaniquement entre des cadres tendus de fils d'acier qui les découpent et donnent naissance aux cubes traditionnels de savon de Marseille.
Le séchage : les cubes de savon sont ensuite disposés sur des clayettes, où ils vont sécher à l’air libre pendant une semaine à quinze jours afin que l’eau contenue puisse s’évaporer.
Les cubes sont déposés délicatement sur des clayettes en bois munies de roulettes. Ils sécheront tranquillement pendant une quinzaine de jours. Le savonnier prend garde de laisser un espace libre entre chaque savon pour assurer une parfaite circulation de l'air et pour pouvoir les tourner manuellement un à un.
L’estampillage : l’ensemble de la fabrication est artisanale et les cubes vont être estampillés un à un dans des presses à savon comportant des moules à tulipes d’époque. Chaque savon est alors marqué sur ses six faces.
La dernière opération consiste à estampiller le savon avant sa commercialisation. D'un geste machinal et régulier, le savonnier dépose chaque savon au milieu d'un moule d'une machine plus que centenaire qui, en se refermant, imprime différents logos dans la pâte durcit de savon. Emballés, les savons sont maintenant prêts à effectuer leur voyage vers les consommateurs.
Et maintenant, vous pouvez vous laver et faire votre lessive !